Le vol

322. (1) Commet un vol quiconque prend frauduleusement et sans apparence de droit, ou détourne à son propre usage ou à l'usage d'une autre personne, frauduleusement et sans apparence de droit, une chose quelconque, animée ou inanimée, avec l'intention :

  1. soit de priver, temporairement ou absolument, son propriétaire, ou une personne y ayant un droit de propriété spécial ou un intérêt spécial, de cette chose ou de son droit ou intérêt dans cette chose;
  2. soit de la mettre en gage ou de la déposer en garantie;
  3. soit de s'en dessaisir à une condition, pour son retour, que celui qui s'en dessaisit peut être incapable de remplir;
  4. soit d'agir à son égard de telle manière qu'il soit impossible de la remettre dans l'état où elle était au moment où elle a été prise ou détournée.

Il s'agit du fait de prendre une chose, un objet qui ne nous appartient pas, dans laquelle nous n'avons aucun droit, en ayant l'intention de priver la personne qui a un intérêt dans cette chose. Théoriquement, la tentative de vol devient un vol au sens du code criminel puisque le résultat importe peu.

Les éléments à prouver

Le fait de prendre ou de s'emparer physiquement de l'objet, le fait de le déplacer, de commencer à le transporter ou de faire en sorte que cet objet soit déplacé s'il est fixé de quelque manière que ce soit, constitue l'infraction. Prendre la chose sans dissimuler son geste ne change pas la nature de l'acte. Il n'existe pas de distinction entre le fait de prendre la chose dans le but de la détourner ou de l'avoir déjà légitimement en sa possession au moment où elle est détournée. C'est ce que l'on appelle le «vol par conversion». Par exemple, lorsque qu'une personne se retrouve en possession d'un objet en sachant clairement qu'il ne lui appartient pas, mais qu'elle décide de l'utiliser ou d'en récolter un avantage quelconque constitue un vol par conversion.

L'objet en cause doit avoir un propriétaire et être susceptible d'être enlevé par une personne de façon à en priver celle qui bénéficie du droit de propriété. Des informations ou des renseignements ne peuvent faire l'objet d'un vol au sens de l'article 322 du Code criminel. Cependant, les documents où sont inscrites des informations le peuvent. Un immeuble ne peut pas être pris, déplacé ou transporté, donc ne peut pas être volé au sens de l'article 322 du Code criminel. Il s'agit d'un droit général de propriété dans le bien. Un individu peut voler l'objet dont il est propriétaire ou dans lequel il détient un intérêt si une autre personne a également un droit ou un intérêt sur ce même objet selon l'article 328 du Code criminel. Le fait que le propriétaire soit inconnu n'empêche en rien l'individu d'être reconnu coupable de vol. La preuve de propriété peut être faite par une preuve directe ou circonstancielle. Lorsque le propriétaire qui a été victime du vol est connu, l'identité de celui-ci doit être mentionnée dans l'acte d'accusation et la poursuite doit prouver cette identité.

L'intention criminelle

L'infraction doit être commise frauduleusement, sans apparence de droit et avec l'intention de priver, temporairement ou absolument, son propriétaire.

L'intention de priver

L'intention spécifique de priver la personne qui a un intérêt dans la chose peut être la simple intention de prendre la chose ou la convertir à son propre usage. Cela serait suffisant pour constituer une intention de priver selon le Code criminel. Cependant, l'accusé doit être conscient que quelqu'un détient un intérêt, un droit dans cet objet. Le fait que l'accusé soit conscient que s'approprier le bien aura pour effet de priver son propriétaire constitue l'intention de priver même si cela n'est pas son but premier, même si le seul but de son acte est de s'enrichir et non pas d'appauvrir un autre individu. Croire sincèrement que l'on pourra rembourser la victime est sans importance et n'amoindrit pas la portée du geste. Le mobile n'est pas pertinent et on ne peut plaider la plaisanterie. Le moyen de défense qui peut être utilisé dans ce cas est celui de semer un doute quant à l'intention criminelle lors de la transaction.

Frauduleusement

Ne crée pas une intention supplémentaire, ni une obligation de prouver que l'accusé savait que son geste était malhonnête. Cela signifie seulement que l'accusé doit savoir qu'il n'a aucun droit en l'objet volé. La jurisprudence veut que l'obtention d'un bien par consentement du propriétaire constitue un vol si ce consentement est obtenu par suprcherie, mensonge ou autre moyen dolosif.

La défense d'apparence de droit

La Cour Suprême a affirmé que l'apparence de droit doit reposer sur l'existence chez l'accusé d'une croyance sincère et raisonnable qu'il avait le droit d'effectuer le geste à l'origine de l'accusation. Si la cour a un doute raisonnable quant à cette croyance sincère et raisonnable, elle doit acquitter l'accusé.

La crédibilité de l'accusé, lors de versions contradictoires, sera évaluée selon les critères établis par la Cour Suprême.

Arrêt W.(D) de la Cour suprême du Canada en 1991

Étape 1 : Si l'accusé est cru quand il vient nier l'accusation, il doit être acquitté.
Étape 2 : Si l'accusé n'est pas cru ou du moins pas totalement, mais que le juge ne peut pas rejeter son témoignage, car il n'est pas tout à fait invraisemblable, l'accusé doit être acquitté.
Étape 3 : L'accusé n'est pas cru et sa version n'est pas vraisemblable donc la cour rejette tout ce que la défense soumet, mais malgré ce qui précède, l'ensemble de la preuve permet-il de prouver hors de tout doute raisonnable que l'accusé a commis l'infraction reprochée, la poursuite a-t-elle prouvé le crime? Si la réponse s'avère négative, la cour doit acquitter l'accusé.

Les peines

En ce qui attrait des vols de plus de 5 000$, l'accusé est passible de 10 ans d'emprisonnement. L'accusé se voit alors octroyé le droit de subir son procès devant un juge et un jury, un juge sans jury ou un juge de la cour provinciale.

Pour ce qui est des vols de moins de 5 000$, l'infraction se trouve hybride et la peine maximale est de 2 ans d'emprisonnement si l'infraction est traitée par acte criminel ou soit d'une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire. L'absolution (absence de dossier criminel pour l'accusé) est une alternative possible si les facteurs atténuants sont suffisants et si l'accusé remplit tous les critères énumérés par l'article 730 du Code criminel. (Ex. : pas d'antécédent en semblable matière, remboursement ou retour du bien à son propriétaire, bien de petite valeur, etc.)

(À LIRE ÉGALEMENT : La rubrique « Le recel »)